Portrait de l'artiste en enfant joueur

Critique
de Wes Anderson
88 minutes 2010

Mais qu’ont-ils tous, ces réalisateurs indépendants américains, à retomber en enfance ?
Après Spike Jonze se lançant dans une improbable adaptation, en prise de vues réelles, de Max et les maximonstres de Maurice Sendak, c’est au tour de l’excentrique Wes Anderson de proposer une relecture en stop-motion (animation image par image) de l’un de ses livres de chevet : un roman de Roald Dahl, Fantastic Mr. Fox (édité en français par Gallimard sous le titre Fantastique Maître Renard). Même si les deux films sont (dans leur facture et leur univers), très différents, leur réussite tient dans la même alchimie entre la sincérité de la démarche, et un vrai regard d’auteur, et l’invention d’une forme ; à mille lieux des produits Disney-Pixar, impersonnels à force de savoir-faire narratif et de perfection technologique… Fantastic Mr. Fox est ainsi un film on ne peut plus "andersonien", reprenant les thèmes chers au cinéaste (la complexité des relations familiales, l’importance du collectif, la magie du cinéma), et fidèle à "l’esthétique tirée à quatre épingles" (l’expression est du critique Vincent Malausa) caractéristique de son cinéma. On pourrait même dire que c’est peut-être le plus andersonien des films d’Anderson, poussant jusqu’au bout le fantasme démiurgique du cinéaste (les décors de La Famille Tenenbaum ou La Vie aquatique tenaient déjà de la maison de poupée)… mettant en scène un portrait de l’artiste en enfant joueur.
 Le fait est que Wes Anderson s’amuse avec une joie enfantine de cette histoire simplissime… qu’il enrichit tout de même de thématiques adultes, absentes du livre de Roald Dahl (comme la contradiction entre anthropomorphisme et animalité), et teinte de sa mélancolie habituelle. Tout l’intérêt du film est dans cette contradiction permanente entre premier et second degré, entre le regard de l’enfant et celui de l’adulte, entre, par exemple, la naïveté revendiquée des procédés visuels et la sophistication des dialogues.
Pour poursuivre l’analyse on se reportera à l’introduction (« Approches thématiques ») de notre dossier pédagogique, qui évoque notamment les influences cinématographiques de Wes Anderson (le film est un véritable hommage au cinéma), son utilisation très particulière de la technique du stop-motion, et replace son renard dans une longue tradition littéraire qui remonte au moyen-âge (via l'adaptation du Roman de Renart par Ladislas Starewitch). Notre dossier propose également une vingtaine de pages d’activités en classe pour le Primaire (Cycle 3) et les classes de Français et d’Anglais du Secondaire.